TyTek 9 Mérule 9 Pourquoi y a-t-il autant de mérule en Bretagne ?

Pourquoi y a-t-il autant de mérule en Bretagne ?

Publié le 22 Sep, 2025

Voici les informations essentielles dans cet article :

La mérule pleureuse, surnommée « le cancer du bois », est un champignon lignivore qui fragilise rapidement les maisons en Bretagne. La région réunit des conditions idéales à son développement : un climat humide toute l’année, des bâtiments anciens riches en boiseries et, plus récemment, des logements mieux isolés mais mal ventilés qui retiennent l’humidité. Résultat : la Bretagne est la zone la plus touchée de France, avec plus de la moitié des communes concernées dans certains départements. La mérule se reconnaît à ses traces blanchâtres ou orangées, son odeur caractéristique et au bois qui s’effrite en petits cubes. Pour limiter les risques, la prévention repose sur une bonne aération, la réparation des infiltrations et un contrôle régulier de l’humidité. En cas d’infestation, seule une intervention professionnelle permet d’assainir durablement le bâti. La vigilance reste donc essentielle pour préserver son logement et éviter de lourds impacts immobiliers.

La mérule pleureuse (Serpula lacrymans) est un champignon lignivore qui s’attaque au bois des maisons. Surnommée « le cancer du bois », elle produit des enzymes dissolvant la lignine et la cellulose, provoquant une « pourriture cubique » des éléments boisés. En Bretagne ce champignon est particulièrement redouté car la région réunit de nombreuses conditions favorables à son développement.

Un climat océanique très humide

La Bretagne possède un climat océanique doux et très humide. Les hivers y sont pluvieux et rarement rigoureux, tandis que les étés restent frais sans canicules marquées. Les taux d’humidité dans l’air dépassent fréquemment 90 % en automne et en hiver. Les relevés météorologiques bretons confirment que la région affiche les indices d’humidité atmosphérique les plus élevés de France. Or la mérule se développe idéalement dans un milieu chaud et humide (températures modérées autour de 15–20 °C), ce qui est souvent le cas tout au long de l’année en Bretagne. Cette absence de froid intense permet aux spores de survivre et à la croissance fongique de se poursuivre quasiment en continu.

Bâtiments anciens et facteur humain

Les constructions traditionnelles bretonnes utilisent en abondance le bois (charpentes, planchers, meubles), offrant ainsi la cellulose qui nourrit la mérule. Historiquement, ce champignon aurait été introduit dans la région via les ports (notamment Brest) par des matériaux importés contenant des spores. Un épisode humide (infiltration, inondation, remontées capillaires) dans une maison hermétique crée un environnement clos saturé d’eau, idéal pour l’explosion du champignon. 

De plus, l’amélioration récente de l’isolation thermique (fenêtres neuves, combles isolés, foyers étanches) a rendu les logements plus étanches à l’air. Sans ventilation mécanique adaptée, l’humidité dégagée par la cuisine, la douche ou le chauffage condense sur les murs et les boiseries, alimentant le développement de la mérule. Ce phénomène est renforcé par la recherche d’économies d’énergie et le confinement dû au changement climatique, qui tendent à enfermer l’humidité à l’intérieur.

Signes d’infestation et prévention

En Bretagne, un grand nombre de communes sont déjà touchées : on estime que 25 à 50 % d’entre elles connaissent des cas de mérule, taux qui dépasse même 50 % dans les Côtes-d’Armor et le Finistère. La Bretagne est de loin la région la plus concernée en France par ce champignon ravageur. À l’intérieur d’une maison, la mérule se détecte souvent à l’odeur de champignon humide et aux signes visuels suivants : un mycélium blanc cotonneux ou des filaments grisâtres sur le bois, des taches brun-orangé bordées de blanc sur les poutres attaquées, et des boiseries qui deviennent friables (des petits cubes de bois s’effritent).

  • Ventilation et aération. Installez ou vérifiez la VMC (simple flux hygroréglable ou double flux) pour renouveler l’air et maintenir le taux d’humidité entre 50 % et 60 %.
  • Contrôle des fuites. Réparez immédiatement toute infiltration d’eau (toiture, gouttières, canalisations), car un dégât des eaux non traité multiplie le risque de développement de mérule.
  • Réduire l’humidité ambiante. Les Bretons ont massivement recours aux déshumidificateurs domestiques face à l’humidité élevée. Évitez de stocker du bois de chauffage ou des cartons contre un mur humide : conservez-les à l’air libre et surélevés.
  • Surveillance régulière. Inspectez fréquemment les endroits sensibles (caves, greniers, dessous d’escalier, etc.) et travaillez autant que possible à la lumière : la mérule se développe mal en plein jour. En France, la loi oblige à déclarer toute découverte de mérule en mairie, ce qui permet un suivi officiel des zones à risque.

Si malgré tout une infestation est détectée, l’intervention d’experts qualifiés est impérative. Le traitement curatif débute par la mise à nu des éléments touchés : on enlève tous les doublages et revêtements contaminés, puis on brûle au chalumeau la surface du bois pour détruire le mycélium superficiel. Un fongicide puissant est ensuite injecté dans les murs et appliqué sur la charpente. 

Dans les cas graves, la maison peut être partiellement vidée ou rendue inhabitable temporairement le temps des travaux. Après cette désinfection, il faut protéger durablement le bâti : remplacer les menuiseries endommagées, créer une lame d’air sous les planchers et traiter préventivement tout le bois sain (par perméthrine ou borate). Les professionnels recommandent également d’utiliser des matériaux inertes en pied de mur (béton hydrofuge plutôt que bois) pour interrompre le retour du champignon. Ces mesures doivent être suivies d’un contrôle régulier de l’humidité intérieure pour vérifier l’efficacité du traitement.

Impact immobilier

En Bretagne, la mérule constitue un enjeu pour le marché immobilier local. La découverte d’une mérule dans un logement est souvent considérée comme un vice caché, entraînant des litiges entre acheteurs et vendeurs. La nécessité d’effectuer un diagnostic spécifique (même s’il n’est pas obligatoire partout) et le coût élevé du traitement dissuadent nombre d’acquéreurs de maisons infectées. L’arrêté préfectoral du Finistère de 2020 délimite d’ailleurs une « zone d’exposition au risque mérule » couvrant une vingtaine de communes (Quimper, Brest, Concarneau, Morlaix, etc.). Ce problème immobilier renforce la méfiance vis-à-vis des logements anciens humides : un achat peut être annulé ou fortement renégocié s’il inclut une infestation.

Traitement et protection

Si la mérule se développe, faire appel à des professionnels est impératif. Le traitement curatif débute par la mise à nu des parties attaquées (plaques de plâtre, faux-plafonds, revêtements…) et la stérilisation de la structure en brûlant au chalumeau (décontamination thermique). Un produit fongicide puissant est ensuite injecté ou pulvérisé sur la charpente et la maçonnerie. Dans les cas les plus graves, la maison peut devoir être partiellement vidée et les occupants relogés quelques semaines. Après cette désinfection, il faut assurer une protection sur le long terme : traitement préventif de tout bois sain (par borate, par exemple), traitement d’étanchéité des murs-bas (joint d’arase, béton hydrofuge), et remplacement des boiseries structurelles trop abîmées. Un suivi régulier de l’humidité du bâtiment est ensuite nécessaire pour vérifier l’efficacité du traitement.

Comprendre pour mieux prévenir

C’est la combinaison du climat breton (forte hygrométrie, pluies fréquentes) et des caractéristiques des logements (nombreuses boiseries intérieures, isolation accrue sans aération suffisante) qui explique la prolifération de la mérule en Bretagne. Pour les propriétaires et acquéreurs, plusieurs précautions simples permettent de réduire le risque : poser des questions sur l’humidité du bien et son historique (dégâts des eaux, rénovations récentes) lors d’une visite, demander un diagnostic mérule si nécessaire, et surtout entretenir le bâtiment après achat. Par exemple, ventiler chaque jour, maintenir le grenier bien sec, repérer rapidement la moindre infiltration et la réparer. 

Des mesures classiques de l’habitat sain sont particulièrement utiles : une VMC bien réglée, un déshumidificateur en cas de besoin, des matériaux adaptés au sol (éviter les parquets ou isolants organiques directement en contact avec la terre battue), etc. Il est également judicieux de travailler au grand jour et d’éviter l’obscurité prolongée dans les espaces confinés (grenier, cave, placards), car la mérule se développe à l’ombre. Enfin, la prévention passe par l’information de tous (architectes, artisans, particuliers) : chaque gouttière dégagée et chaque bouche d’aération débouchée contribue à réduire la prolifération. Ces précautions, souvent évoquées dans la littérature technique et les retours d’expérience locaux, restent les meilleures armes contre ce « fléau des logements anciens » en Bretagne.

Ces facteurs expliquent la prolifération de la mérule : maîtriser l’humidité du logement est la priorité pour préserver l’habitat. La Bretagne reste l’épicentre français de ce fléau : la vigilance y est absolument impérative.